Thekchèn Tcheuling, Dharamsala, Inde – Dans sa résidence ce matin, Sa Sainteté le Dalaï-Lama a rencontré 58 membres iraniens, PDG de petites et moyennes entreprises qui se décrivent comme des messagers de la paix. Quand Sa Sainteté entra dans la salle, ils le saluèrent par des applaudissements amicaux.
« Je suis très heureux de rencontrer des ressortissants iraniens, leur dit-il. Certains se méfient des Iraniens, mais je me souviens qu'il existait des liens entre le Tibet et la Perse à l'époque du roi Songtsèn Gampo, au VIIème siècle. Et alors que les Perses étaient décrits comme riches, les Mongols étaient qualifiés de guerriers.
« J'ai certains engagements. Étant l'un des 7 milliards d'êtres humains qui souhaitent vivre une vie heureuse, je m'engage à aider les gens à comprendre que c’est possible en cultivant un esprit calme et heureux basé sur l'amour et la compassion. En termes simples, si vous pouvez être compatissant et bienveillant, vous serez heureux.
« Ensuite, en tant que moine bouddhiste, je me sens la responsabilité morale de promouvoir l'harmonie entre les religions. Sur le plan philosophique, il y a toutes sortes de différences entre les traditions religieuses, mais leur message commun est l'importance de cultiver l'amour. Je suis convaincu que l'harmonie entre les religions est possible ; regardez l'Inde où tant de traditions religieuses vivent côte à côte depuis des milliers d'années. Parce que j'apprécie l'harmonie entre les religions, je suis heureux de rencontrer des croyants d'autres confessions, c'est donc un réel honneur pour moi de vous rencontrer aujourd'hui, frères et sœurs chiites.
« De nos jours, il est vraiment impensable de voir des gens se battre et s'entretuer au nom de la religion, que ce soit en Égypte, en Birmanie ou en Afghanistan. La semaine prochaine, à Delhi, j'assisterai à une réunion pour célébrer la diversité parmi les musulmans indiens. Je n'ai pas entendu parler de frictions entre sunnites et chiites en Inde, alors j'ai encouragé mes amis du Ladakh à prendre des mesures plus actives pour réconcilier les différences entre leurs frères et sœurs de différentes dénominations.
« Quand je rencontre des gens de traditions spirituelles différentes, je me souviens que de manière fondamentale, nous sommes tous pareils en tant qu'êtres humains. Dans la région du Tibet où je suis né, nous avions des voisins musulmans et, enfants, nous jouions joyeusement ensemble, sans nous soucier de différences entre nous. Une fois arrivé à Lhassa, notre capitale, sous le nom de Dalaï-Lama, j'ai découvert qu'il y avait aussi une petite communauté musulmane. Ils étaient là depuis l'époque du 5ème Dalaï-Lama, qui leur avait donné un terrain pour y construire une mosquée. Presque aucune dispute n’a été constatée entre les bouddhistes locaux et ces musulmans, qui étaient pacifiques, cuisinaient des plats délicieux et parlaient dans un dialecte parfait du Tibet central.
« J'attends avec impatience la prochaine réunion et j'espère que des représentants des ambassades de divers pays musulmans y assisteront également. Je crois que ce sera l'occasion de promouvoir l'harmonie entre les religions. »
Parmi les questions qui lui furent posées, Sa Sainteté dû répondre à celle-ci : si les bouddhistes ne croient pas en Dieu, comment rendent-ils compte de la création ? Il répondit que, comme les Jains, les bouddhistes croient que les vies s'enchainent indéfiniment et ce sans commencement. Avoir une vie heureuse ou difficile dépend de la façon dont vous vous êtes conduit auparavant. Être bon et compatissant envers les autres et éviter de leur faire du mal sont de bonnes causes pour une future vie heureuse. L'important est de donner un sens à la vie : penser que vos semblables sont les enfants d'un Dieu miséricordieux peut vous y aider, et Sa Sainteté expliqua qu'il apprécie cette idée.
Interrogé sur sa réaction face au harcèlement des musulmans en Birmanie, Sa Sainteté expliqua qu'il était à Washington DC lorsqu’il en entendit parler pour la première fois. Il a exprimé sa tristesse devant ce qui se passait et a appelé les bouddhistes birmans non seulement à se souvenir du Bouddha, mais aussi à réfléchir que s'il était là, il aurait protégé ces musulmans. Sa Sainteté expliqua qu'il avait également exprimé sa consternation à Aung San Suu Kyi, qui répondit que la situation était très difficile et qu'elle ne pouvait pas faire grand-chose. En signe de sympathie et de préoccupation pour le bien-être de ces personnes déplacées, il a demandé à la Fondation Gadèn Phodrang du Dalaï-Lama de faire un don afin de leur procurer aide humanitaire et moyens de réinsertion par l'intermédiaire du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés. Les Iraniens manifestèrent leur reconnaissance par une nouvelle salve d'applaudissements.
Avant la fin de cette entrevue, les visiteurs se rassemblèrent autour de Sa Sainteté en petits groupes pour se faire photographier en sa présence, apparemment très heureux de l'avoir rencontré.