Dans des conditions de froid persistant et sous un ciel couvert, environ 7 000 personnes se sont rassemblées ce matin autour et à l’intérieur du Tsouglagkhang, le temple tibétain principal, ainsi que dans la cour inférieure. Parmi elles, il y avait plus de 2 000 moines et moniales, dont beaucoup venaient des grands centres d’étude d’Inde du Sud, des Tibétains locaux et environ 800 personnes issues de 54 autres pays.
Sa Sainteté le Dalaï-Lama arriva un peu plus tôt que prévu et ne perdit pas de temps pour commencer l'enseignement.
« Aujourd'hui, nous allons passer en revue un commentaire annoté sur l'Essence de la voie du milieu. Comme l'écrit Djé Tsongkhapa au début de son Grand traité du tantra : " Nous devons pouvoir prouver les enseignements du Bouddha en nous fondant sur la raison afin de ne pas être égarés par nos adversaires ". J'ai fait une remarque similaire à la fin de la Louange aux 17 Maîtres de Nalanda : " Il est extrêmement important que ceux d'entre nous qui suivent le Bouddha aient une foi fondée sur la connaissance de son enseignement. Par conséquent, nous devons en examiner les raisons avec un esprit impartial et curieux, en l'analysant de près. " En Inde, il existait de nombreuses écoles de pensée concurrentes. Bhavavivéka (500-578) aborde leurs points de vue, ce qui rend ce livre particulièrement précieux.
Quand, en revanche, Atisha a composé sa Lampe de la voie vers l’éveil, au Tibet au XIème siècle, il ciblait la transformation de l’esprit d’un individu d'une manière spécifique.
« J'ai reçu la transmission des 13 textes classiques de Khounou Lama Rinpoché et Guéshé Rigzin Tènpa, Khènpo Kounga Wangtchouk, etc., et j'ai pensé qu'il était important de recevoir aussi la transmission de cette œuvre, l'Essence de la voie du milieu. Cependant, mes recherches ont révélé qu'il n'y en avait pas. J'ai pensé que si nous avions un commentaire annoté du texte, je pourrais le recevoir, alors j'ai demandé à Sakya Khènpo Kounga Wangtchouk (1921-2008) de le préparer et de me le donner. Bhavavivéka a composé ce texte en vers et également écrit son propre commentaire, connu sous le nom Flambeau du raisonnement.
Sa Sainteté commença à lire. Après le titre en sanskrit, Madhyamakahrdayakarika, il remarqua que Khènpo Kounga Wangtchouk avait écrit " et dans la langue du Tibet central ", plutôt que simplement " et en tibétain il s’appelle Ouma Nyingpo ". Pour Sa Sainteté, l’important est qu'il est écrit dans la langue tibétaine établie par le roi Songtsèn Gampo et dans laquelle le roi Trisong Détsèn a commandé la traduction du Kangyour et du Tèngyour.
Vint ensuite l'hommage du traducteur, également connu sous le nom de " salutation imposée par l'ordre royal ". Le roi Tri Ralpatchèn décréta que l'hommage du traducteur devait indiquer à quelle section des Trois Corbeilles des enseignements du Bouddha appartenait l'œuvre. Dans ce cas, l'hommage rendu au jeune Manjoushri indique que l'œuvre fait partie de l'abhidharma ou recueil de la connaissance supérieure.
Sa Sainteté fit remarquer qu'il y a de nombreuses références à la claire lumière subjective qu'il a mentionnée hier comme ayant été révélée dans le troisième tour de roue des enseignements du Bouddha. Cette conscience primordiale, dit-il, n'est pas issue de causes et de conditions adventices, mais demeure depuis des temps sans commencement.
« Pour quelle raison ce traité a-t-il été composé ? Pour conduire ceux qui ont développé l'esprit d'éveil de la bodhicitta vers l’éveil. Pour résumer, ceux qui ont développé l'esprit d'éveil ne devraient jamais l'abandonner, mais devraient nourrir les quatre intentions pour accomplir les desseins des êtres et les placer sur le chemin juste. Sa Sainteté fit de nouveau remarquer que Bhavavivéka fut le premier maître madhyamaka à écrire sur les écoles de pensée rivales et les différences intellectuelles qui agitèrent la communauté bouddhiste. »
Après avoir lu le premier chapitre, « Ne pas abandonner la bodhicitta », Sa Sainteté passa au second, « Entrer dans la pratique ascétique du sage ». Encore une fois, il observa que l'esprit est un courant de conscience, de sorte que la continuité d'un être est considérée par rapport à la conscience. Parce que la conscience est un continuum, une personne ne peut pas être intrinsèquement existante. Il expliqua que l'intérêt scientifique pour l'esprit subtil grandit en partie grâce aux tentatives d’expliquer les souvenirs de vies antérieures de certaines personnes et le phénomène de « thouk-dam » ; il se produit lorsque le corps d'un méditant expérimenté reste frais après la mort clinique. L'explication bouddhiste en attribue la cause à la présence continue de la conscience subtile.
Sa Sainteté commença à lire le chapitre trois, « La quête pour comprendre la réalité » et s'arrêta en arrivant au verset 260. Il reprendra sa lecture demain.